La solidarité est la mère de la fraternité

Le 10 avril 2023 

Dans Une fraternité, des fraternités, trois voix différentes,[1] celle d’un responsable politique, celle d’un imam et celle d’un évêque, amis, s’unissent pour défendre la nécessité de faire vivre concrètement, dans notre société, la fraternité.  Car aujourd’hui, la mondialisation, la pensée matérialiste, les mass media et les réseaux sociaux nous obligent d’y revenir.  Nous réfléchissons à cette notion dans cette saison de printemps, moment de célébration des cœurs et des esprits renouvelés. 

La fraternité que défendent ces trois voix est ancrée dans un véritable esprit de solidarité : elle est fondamentalement liée à la responsabilité collective et à l’accueil solidaire des personnes qui viennent chercher accomplissement et protection. Elle s’inscrit également dans le cadre d’un engagement visant à défendre les droits humains et la dignité des êtres humains.  La fraternité est donc inextricablement liée à la solidarité, car cette solidarité englobe la responsabilité par rapport à tous.  C’est elle qui peut garantir un environnement de bienveillance dans lequel chacun est respecté.  La solidarité est mère de la fraternité.  Comment alors appliquer l’esprit de la fraternité aux problématiques de nos jours ?

Pour les auteurs, la laïcité constitue un élément essentiel de la fraternité, car elle permet à chacun d’exprimer sa liberté religieuse et ses convictions personnelles.  En revanche, c’est l’Etat qui doit rester laïque, et non pas la société.  La laïcité doit être l’expression d’un vivre-ensemble, et une façon de construire des ponts et tisser des liens forts.  Si la laïcité doit garantir la neutralité de l’Etat, elle doit être aussi une invitation pour les citoyens eux-mêmes à mieux se comprendre à travers des partages et des dialogues interculturels et interconfessionnels, tout en respectant les croyances et les conceptions du monde des uns et des autres. 

Par ailleurs, la fraternité ne se limite pas aux frontières nationales. Elle consiste aussi à s’ouvrir et à accueillir les personnes qui fuient des zones de conflits et des désastres climatiques en leur apportant un véritable espoir : celui d’une nouvelle vie. Les auteurs nous rappellent : « Les six pays les plus riches du monde accueillent 6 % des réfugiés de la planète. Les six pays les plus pauvres du monde, plus de 50 %. » Il est donc urgent d’agir pour que soit respectée la solidarité internationale et l’accueil des réfugiés, pour que la fraternité s’exprime au-delà des frontières.

La fraternité est une obligation. Les auteurs nous rappellent :  « La liberté et l’égalité relèvent de questions de droit. La fraternité est une obligation morale. [...] Sans la fraternité, la liberté conduit à l’égoïsme. »  C’est pourquoi, nous devons tous être engagés et agir concrètement pour faire vivre l’esprit de fraternité dans notre société, et ce notamment à travers des centres d’intérêt communs, quel que soit l’origine de la personne : la nourriture, l’art, la musique, la culture, le sport, la nature, la famille.

La fraternité humaine est un concept abstrait, mais elle se décline à travers des valeurs.  Cela comprend les valeurs de la paix, de la justice, du bien, de la beauté et de la coexistence commune, entre autres.  C’est ce qui a été rappelé par Sa Sainteté Pape François et Grand Imam d’Al-Azhar Ahmad Al-Tayyeb lors de leur co-construction d’une nouvelle voie pour l’humanité, La Fraternité Humaine, en 2019. Cela consiste « à soutenir les valeurs de la connaissance réciproque, de la fraternité humaine et de la coexistence commune, à rétablir la sagesse, la justice et la charité et à réveiller le sens de la religiosité chez les jeunes. »

Si la fraternité est un concept historique, rien n’empêche à innover.  Pour ma part, cela consiste à chercher et à s’appuyer sur des synergies naturelles qui existent dans notre société.  Entre les personnes jeunes et âgées.  Entre les citoyens récemment arrivés et ceux qui ont vécu toute leur vie dans le pays.  Entre les espaces qui restent vides et les personnes qui ont besoin d’une espace de vie ou de création.  Entre les établissements qui ont de quoi à manger et ceux qui ont faim.  De privilégier le « co-learning » au lieu du « donner des leçons ».

La fraternité fonde le lien entre l’humanité et représente un chemin vers une coexistence plus harmonieuse et plus juste.  Pour cela, chacun doit s’engager à promouvoir des valeurs humanistes.   La fraternité doit être encouragée, en développant des liens entre les citoyens et en créant un climat de respect mutuel. Si les états sont des constructions politiques, la fraternité une construction humaine.  Elle ne peut pas exister sans l’engagement des individus à cultiver la solidarité, en commençant avec du plus près. 

CPM

[1] Les auteurs de l’ouvrage sont Jean-Paul Vesco, Jean-Michel Le Boulanger et Mohamed Loueslati.

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